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Vieilleries
[L'auteur]
Marlène TISSOT est venue au monde inopinément. A
cherché un bon bout de temps avant de découvrir qu'il n'y avait pas de mode d'emploi.
Sait dorénavant que c'est normal si elle n'y comprend rien à rien. Raconte des histoires depuis qu'elle a dix-ans-et-demi et
capture des images depuis qu'elle a eu de quoi s'acheter un appareil. Ne croit en rien, surtout pas en elle, mais
sait mettre un pied devant l'autre et se brosser les dents. Ecrira un jour l'odyssée du joueur de loto sur
fond de crise monétaire (en trois mille vers) mais préfère pour l'instant se consacrer à des
sujets un peu moins osés.
[Editions]
Mes pieds nus dans tes vieux sabots bretons,
collection 8pA6 de
La
Vachette Alternative
Nos
parcelles de terrain très très vague,
Éditions Asphodèle, Collection Minuscule

disponible également via
Fnac,
Chapitre,
Amazon,
Place des Libraires
London Trip Diary, At Home Editions

disponible via

Celui qui préférait respirer le parfum des fleurs,
collection 8pA6 de
La
Vachette Alternative

[Parutions en revue]
L'Angoisse -
Chos'e -
Dissonances -
Interlope -
Interruption -
Katapulpe -L'Autobus - Levure Littéraire - Mauvaise graine -
Microbe - Magnapoets - Nouveaux Délits -
Revue Squeeze - Traction Brabant - Trace écarT -
Le Zaporogue
[Participations]
CroutOthon -
FPDV -
Le Quotidien des Martyrisés -Les 807 -
Les Etats Civils - OnLit - Sistoeurs.net - Vents Contraires - Vous dites ?
[Email]
marlene.tissot@gmail.com
[Marlène ailleurs]
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On Lit
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Ne pas faire pleurer maman
La moiteur aigre des aisselles. Je transpire. Putain, qu’est-ce que je
transpire. De vastes auréoles. Ma chemise repassée à la va-vite. Le col qui
serre. Je me demande s’il a remarqué. S’il a senti. L’odeur du stress. De
l’angoisse. De ces putains de douleurs inexpliquées qui me vrillent les
pensées.
Le gars du pôle emploi me regarde. Avec son sourire sous cellophane comme un
bout de viande avarié. A moins que ce ne soit un employeur. A moins que ce
ne soit le médecin. Je ne sais plus.
Docteur, j’ai des hallucinations, je me sens un peu perdu. Et puis je
transpire beaucoup.
Ca ressemble à ces moments de flottement. Comme lorsqu’on se réveille
sans reconnaître l’endroit où on se trouve. Il faut réassembler les pièces
du puzzle. Méthodiquement. Alors j’assemble. J’ajoute. Deux et deux. Me plie
en quatre pour rentrer dans le moule. Mais je déborde. Je fuis. Je
transpire.
Vous êtes nerveux ? me demande le médecin. A moins que ce ne soit un gars du
pôle emploi. Un employeur. Non, bien sûre que non. Je n’ai aucune raison
d’être nerveux !
Faut que je trouve un job.
Faut pas que je perde mes indemnités.
Faut que je fasse renouveler mon ordonnance.
Faut que j’appelle maman. Mais elle va encore pleurer. Elle aura forcément
des raisons de pleurer. Avant, je voulais qu’elle soit fière de moi.
Maintenant, j’essaye juste d’éviter de la faire chialer. Faut que je trouve
un emploi !
Alors je balance au gars le Top Ten de mes qualités. Je bombe le torse. Je
lui explique que je suis le meilleur pour ce boulot. J’essaye d’avoir l’air
convaincu, sérieux, digne, humain, normal.
C’est pas à moi qu’il faut dire ça, ricane le type.
Merde, j’ai mal assemblé les morceaux. Lui c’est le gars du pôle emploi.
Pourtant, il a une gueule d’employeur. Pourtant il a un pull de docteur.
Il me faut ces foutus cachets.
Je transpire.
Pourquoi vous êtes nerveux comme ça ? il me demande.
Je ne suis pas nerveux. Du tout.
Son sourire en coin. Putain ! Son air de se payer ma tête.
Il se lève et va ouvrir la fenêtre. Il revient s’asseoir. Imprime une offre
d’emploi. Avant de me la tendre, il s’évente avec la feuille. Je remarque sa
petite grimace.
Dites-le si je pue !
Oui monsieur, vous sentez mauvais. Faut pas aller aux entretiens
d’embauche dans cet état, vous savez, il ajoute. Et il refait sa petite
grimace.
Je suis pas à un entretien d’embauche là, alors faites pas chier !
Oh, on se calme, il me lance. La prochaine fois, pensez à prendre une
douche avant de venir. C’est tout.
Comme si je me lavais pas, putain ! C’est juste le stress. Les emmerdes. La
maladie, les cachetons, le monde qui me fout les jetons. Je transpire
l’angoisse. Je déborde d’angoisse. Il est capable de comprendre ça ce
connard ?
Connard ! je lui dis. Comme ça, bêtement. Sous le coup de la colère.
De la vexation. Qu’est-ce que j’en sais ? Et l’autre, illico, il grimpe sur
ses grands chevaux. Il se met à hurler que j’ai pas le droit de l’insulter,
qu’on va voir ce qu’on va voir, ça se passera pas comme ça, qu'il est pas
payé pour recevoir des gens qui l’injurient et qui pue par-dessus le marché,
qu’il va en référé à, prendre les mesure qui.
Il débite, il débite. Et moi je lui balance le clavier en travers de la
gueule, juste pour le faire taire. Mais le gars du bureau d’à côté débarque.
J’ai prévenu la sécurité. J’ai appelé la police, il dit.
Ils me foutent le grappin dessus. S'y mettent à trois pour m’immobiliser
alors que j'oppose pas la moindre résistance. J'ai jamais su me battre. Ils
me traînent dans une petite salle en répétant que trop c’est trop ! Que j’ai
dépassé les bornes. Que je suis radié, bien entendu, ah ah on fait moins le
malin maintenant, hein !
Les flics arrivent. Ils vont m’amener au poste.
Faudra que j’appelle maman.
Elle va encore chialer...
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