Marlène TISSOT est venue au monde inopinément. A
cherché un bon bout de temps avant de découvrir qu'il n'y avait pas de mode d'emploi.
Sait dorénavant que c'est normal si elle n'y comprend rien à rien. Raconte des histoires depuis qu'elle a dix-ans-et-demi et
capture des images depuis qu'elle a eu de quoi s'acheter un appareil. Ne croit en rien, surtout pas en elle, mais
sait mettre un pied devant l'autre et se brosser les dents. Ecrira un jour l'odyssée du joueur de loto sur
fond de crise monétaire (en trois mille vers) mais préfère pour l'instant se consacrer à des
sujets un peu moins osés.
J'ai
parfois envie
de tomber amoureuse
de quelqu'un
qui n'existe pas
The love that lasts the longest is the love that is never
return [W. Somerset Maugham]
Mauvaise graine
Le 71ième numéro de la revue MGV2 est
sorti et il est placé sous le signe du GOLF, c'est à dire
"Gentlemen Only, Ladies Forbidden". Mais l'obéissance n'étant
pas ma principale vertu, j'ai chaussé ma peau d'homme pour y
glisser une nouvelle très mâle. La revue se commande dans sa
version papier sur
Lulu et peut également se lire en ligne
ici.
Dimanche 30 décembre 2012
Le
trou
Ces
choses rassurantes
qui me parlent de la vie
aussi bien qu'une paire de
chaussettes trouées
Bon
voyage
[Photo Marlene T.]
Samedi 29 décembre 2012
Maladie
Les
rêves n'ont pas toujours
le goût sucré
d'une nuit étoilée
Ils te font peur parfois, les rêves
et leur grandeur d'ogre vorace
ils avalent le temps que tu crois perdre
mais aucune seconde n'est jamais vaine
ni gaspillée
lorsqu'elle est passée
à respirer en direction de l'espoir
(paraît-il)
pourtant, tu te dis que le rêve
c'est comme un cancer
silencieux
qui te ronge lentement
sans jamais lâcher prise
une maladie dont tu aimerais guérir
sans chimie
ni substitut
simplement en fermant les yeux
pour voir plus près de
la réalité
Vendredi 28 décembre 2012
Microbe n°75
Ce numéro a été préparé par Jany Pineau.
Au sommaire :
Samantha Barendson
Anna de Sandre
Cathy Garcia
Isabelle Guilloteau
Virginie Holaind
Sabine Huynh
Perrine Le Querrec
Murièle Modély
Emmanuelle Pagano
Catherine Peintre
Jany Pineau
Cécile Portier
Céline Renoux
Khun San
Marlène Tissot
Jasmine Viguier Illustrations : Sabine Danzé
Les abonnés le recevront dans quelques jours.
Les abonnés « + » recevront également le 38e mi(ni)crobe signé
Murièle Modély : À LA LETTRE.
Comme d’habitude, les autres ne recevront rien !
Pour tous renseignements, contactez Eric.
Mercredi 26 décembre 2012
Piste d'envol
[Leçon de danse, Valence 2005, Photo Marlene T.]
Innocent blood
[Un texte cadeau du poète-revuiste-éditeur Walter
Ruhlmann]
Innocent Blood
for Marlene T.
She makes me think of a bird:
not one with wide wings
spanning yards when it flies.
No. She hides behind her books
and she looks like a sparrow,
a robin or a swift.
She knows when seasons shift,
when time has come to play dead
or imagine the tide
invading her brain or flooding her heart.
We met through shorts and lines,
it was in Spring maybe,
this is not so clear now.
She came covered in snow,
she had written something on the back of her hands,
under her blue eyelids,
she had strange eyelashes.
She knows how to seduce me with words,
all these precious gems she affords.
Lately, the dark rhymes she sent
pierced my soul, deeper than expected,
recent feeling I resented feeling.
I don't blame her for that
she only shared her art
masterly crafted, issued from the tips
of her fingers, from the depths
of her spirits and from the strength
of her rage.
L'innocente
à Marlène T.
Elle me fait penser à un oiseau:
pas l'un de ceux aux ailes larges
à l'envergure kilométrique quand ils volent.
Non. Elle se cache derrière ses livres
et ressemble à un étourneau,
un rouge-gorge ou une hirondelle.
Elle sait quand changent les saisons,
quand il est l'heure de faire le mort,
où d'imaginer la marée
qui envahit son esprit ou son coeur.
Nous nous sommes rencontrés avec des textes courts, des vers,
c'était au printemps peut-être
tout ça n'est plus si clair.
Elle était couverte de neige
et avait écrit quelque chose au dos de sa main,
sous ses paupières,
ses cils étaient étranges.
Elle sait me séduire avec les mots
comme des joyaux qu'elle offre au monde.
Récemment, la sombre comptine qu'elle m'a envoyée
a percé mon esprit, plus que je ne m'y attendais,
des sentiments récents que je refusais d'éprouver.
Je ne lui en veux pas
elle n'a fait que partager l'art
qu'elle façonne à merveille du bout
de ses doigts, du fond
de son esprit et à la force
de sa rage.
Lundi 24 décembre 2012
La
poussière
Tu souffles quelques
mots - simples - à mon oreille - et c'est comme un vent - indocile - qui
viendrait bousculer - la poussière dans mes pensées - Ce que je regarde
- avec tes yeux - ressemble à un paysage - débarrassé de sa saleté
Si
les mensonges faisaient pousser les arbres
[Photo Marlene T.]
Dimanche 23 décembre 2012
L'humeur du dimanche : Apprendre à voler
[Monty Python]
Samedi 22 décembre 2012
Une
pluie de confettis
Asphodèle crée une nouvelle collection.... Elle se nomme
"confettis" : 10 pages, 10X15, 2€. La collection s'ouvre avec 9 titres
d'emblée.... Tous les auteurs "historiques" ont répondu. Stéphane Prat,
Thomas Vinau, Guillaume Siaudeau, Marlène Tissot, Cathy Garcia, Anne
Jullien, Pierre Soletti et Jean-Luc Nativelle. Qu'ils soient
remerciés... Les huit premiers sont dispo. On commande
ICI
Vendredi 21 décembre 2012
Gourmandise
Garder
le meilleur
pour la faim
Slice of life
[Avignon Septembre 2002, photo Marlene T.]
Jeudi 20 décembre 2012
Y'a
de la joie
Les
préparatifs
Les centres commerciaux qui dégueulent
de la chair humaine pressée jusqu'à l'os
Les pères-noël factices qui planquent
leur précarité sous une barbe mal collée
Les marrons dans le cul de la dinde
Les mômes qui s'impatientent et
se font enguirlander comme le sapin
Elle pique un peu cette joie-là
n'est-ce pas ?
The nightmare before christmas
Une bouffée de haine pour tout ce qu'il voyait emplit son
âme, et s'étendit comme les motifs circulaires et concentriques des
carreaux du métro [] La rue maculée de lumière...
[La famille Royale, William T. Vollmann, trad. Claro]
Mercredi 19 décembre 2012
L'instant qui précède
Tes cheveux sont
devenus blancs du jour au lendemain et tout était blanc autour, les murs
de la chambre, les blouses des infirmières, les draps, tes regards qui
se posaient sur nous et nous traversaient, comme si nous avions disparu.
Nous étions tes fantômes. La vie et la mort s'amusaient à échanger leur
costume, à brouiller les pistes, pendant l'instant qui précède la fin.
[Valence, Photo Marlene T.]
Mardi 18 décembre 2012
Mandala
Il y a
ces jours où
la vie ressemble à un mandala
ces petites choses qui reviennent
cycliquement
entrelacs de détails intimement liés
dessinés comme un labyrinthe
dont on cherche inlassablement
l'issue
Enfermé dans l'image
[Berlin, photo Marlene T.]
Lundi 17 décembre 2012
De
loin
La
nuit, la ville scintille sous ses lumières
comme une femme couverte de bijoux clinquants
belle, mais seulement de loin
Il est temps de prendre le temps (en otage)
[Berlin, photo Marlene T.]
Dimanche 16 décembre 2012
L'humeur du dimanche
[Imaginez un instant les tablées de fêtes de fin d'année
qui se préparent via la lorgnette de ce petit extrait... tout de suite,
je retrouve le sourire! Désolée, mais les orgies de bouffe et la
surconsommation, ça me dégoûte encore plus que le caca.]
Samedi 15 décembre 2012
Mon chéri,
L’horoscope a été formel, cette semaine nous devons rompre et je vais
sans doute beaucoup pleurer mais d’un autre côté, je dois également
m’attendre à une bonne nouvelle dans ma vie professionnelle. Tu sais à
quel point c’est important pour moi ! Je ne peux prendre aucun risque.
Des hommes, il y en a plein les rues et je ne suis pas très regardante
sur la qualité. En revanche, je nourris de grandes ambitions
professionnelles. Tu me vois donc au regret de te signifier ton congé
sans préavis. Tes qualités humaines et tes performances sexuelles ne
sont bien entendu aucunement en cause, rassure-toi. En espérant que tu
retrouveras rapidement un autre poste de conjoint modèle, je te prie
d’agréer mes sentiments astrologiquement dévoués.
Ton Irma
[Initiation à la lettre de rupture, bientôt dispo via
DIYZines]
Vendredi 14 décembre 2012
Marcher au pas
Vivre
avec son temps
est-ce nécessairement
s'efforcer de suivre
le rythme du troupeau ?
Machines et inventions
Le n°6 de la revue
l'Ampoule est sorti, et on y trouve de sacrées
inventions !
Dans ce numéro, vingt textes et onze illustrations à découvrir
sur le thème des machines et des inventions.
Merci à tous les participants : Raymond Penblanc, M-Rose Cornu,
Christian Jannone, Philippe Sarr, Sébastien Marcheteau,
Arthur-Louis Cingualte, Romain Giordan, Christian Attard,
François Cosmos, Alain Lasverne, Marc Laumonier, Yokshares,
Marianne Desroziers, Serge Cazenave-Sarkis, Édouard.k.Dive,
Catherine Bédarida, Jacques Cauda, Benoît Patris, Georgie de
Saint-Maur, Antonella Fiori, Philippe Choffat, See Real, Chris
Simon, Marlène Tissot, Florence Dupin, Diane Comte Frost,
Natacha Gréget, Hugues Breton, Marray, Julie Garnier, Gilbert K.
et KOWALSKI.
Jeudi 13 décembre 2012
Together alone
On te
répète jour après jour
que seul tu n'es rien
alors doucement
tu deviens
rien
La nuit serait brumeuse, avec des
diadèmes autour des lampadaires
[La famille Royale, William T. Vollmann, trad.
Claro]
[Photo Marlene T.]
Mercredi 12 décembre 2012
Escapade
Cette
manière de s'en aller sans partir
lorsque ses yeux regardent
là où personne d'autre
ne peut voir
Going nowhere
[Berlin, Photo Marlene T.]
Suite à une mauvaise
manip, tous les posts du 4 novembre au 11 décembre 2012 ont disparu dans
les limbes du virtuel. Evidemment, je n'avais pas fait de sauvegarde...
Samedi 3 novembre 2012
Ça
ne se fait pas
On se planque
même à l’écrit
sous le second degré
la métaphore
la poésie
parce que dire les choses simplement
dire le vrai
le cru
c’est un peu comme regarder un inconnu
droit dans les yeux et lui parler
c’est suspect
et grossier
alors on se contente de noter
merde à celui qui le lira
sur les murs des chiottes publiques
pour évacuer le trop plein
sans heurter personne
Burn
[Lyon, Photo Marlene T.]
Vendredi 2 novembre 2012
Sans
visage
Quelqu'un sans
visage te dit des choses douces quelque part de l'autre côté de l'écran.
Il y a cet instant au sommet duquel tu te retrouves en équilibre à te
demander si c'est mieux ainsi, ce petit froid qui persiste par delà la
barrière lumineuse de l'écran - Comment s'émouvoir vraiment sans peau ni
regard ni sourire ni voix ? - Une réponse, un clic, retour à
l'ordinaire, oublié, pfuitt. Il y a cet instant au sommet duquel tu te
retrouves en équilibre à penser à la vie de ce quelqu'un sans visage qui
te dit des choses douces - Il n'y a pas toujours besoin de peau de
regard de sourire de voix pour sentir la chaleur.
Jeudi 1 novembre 2012
Sélection 2013 pour le prix du Premier Roman
La voilà annoncée la sélection du cru 2013 -
Et il y a de la Maille à l'envers à l'intérieur - Et ça
me fait un peu drôle quand même - Et je me dis qu'avec mes
lainages détricotés je vais mettre un beau bazar à Laval - Et
j'ai vaguement l'impression d'un truc qui cloche - Surtout quand
je vois le reste de la sélection - Et je me dis qu'il en faut
pour tous les goûts - Et j'y peux rien, c'est comme ça, quand il
m'arrive des trucs chouettes j'ai toujours dans l'idée qu'il y a
erreur sur la personne - Et je me fais toute petite - Et
j'essaie qu'on me remarque pas - Et on me suggère que peut-être
ce n'est pas la bonne méthode - La bonne méthode pour quoi, au
juste ?
Pas quelqu'un d'autre
Errer
c'est n'aller nulle part
n'est-ce pas?
et bien, c'est là où je vais
où je suis
d'où je viens
nulle part et
on pourrait parfaitement dire que
je n'existe pas
en quelque sorte
mais ce n'est pas tout à fait la même chose
que chercher à être quelqu'un
d'autre
La
chose (qui n'existe pas)
[Lyon, Photo Marlene T.]
Mercredi 31 octobre 2012
Contrôle tes émotions
Parfois ta voix
tremble un peu et je vois bien que tu n'aimes pas ça. Quelque chose au
creux de toi qui gueule "contrôle tes émotions pauvre con". Et sur moi,
ça tremble aussi quand tu me parles. Le menton, la lèvre inférieure, un
peu comme si j'allais chialer. Les petits muscles de mon visage qui s'en
donnent à coeur joie pour me coller des grimaces ridicules.
J'essaie de me détendre, mais les mains sont moites et le dos tendu. Je
m'agrippe à tes mots. J'y plonge. Et, ne te méprends pas, tes paroles
m'intéressent réellement. Mais parfois, des pensées parasitent ma tête.
Je me mets à imaginer des trucs comme, passer ma langue sur ta joue
râpeuse ou mes mains à rebrousse poil dans tes cheveux.
Alors j'évite de croiser ton regard, de peur que tu ne lises en moi des
choses qui ne veulent rien dire. Des choses que je ne comprends pas. Je
contrôle mes émotions. Je contrôle.
Etre ici c'est beaucoup [Rilke]
[Lyon, Photo Marlene T.]
Mardi 30 octobre 2012
J’emmerde les cris de victoire
On nous abreuve dès l’enfance du désir de gagner
sans songer à l’utilité de nous apprendre
à perdre
Avant - Après
[Photo Marlene T.]
Lundi 29 octobre 2012
La
vie, la mort
Il
pense que le bonheur n’est pas loin sans doute, mais qu’il n’a aucune
envie de lui courir après.
Il pense que le bonheur n’est pas un chien à domestiquer mais une
invention marketing.
Il pense que le chagrin n’est pas une maladie et n’existe pas vraiment
non plus.
Il pense qu’il est vivant et ça lui fait peur parfois.
Peur comme d’être à la tête d’une puissance infinie dont il ne
maitriserait pas le mode d’emploi.
Il pense qu’il devrait faire quelque chose de tout ce qu’il a entre les
mains mais il n’en a pas la moindre envie.
Il pense qu’il est ingrat.
Il pense qu’il n’en a rien à foutre de l’ingratitude.
Il pense que la vie, on n’en a pas plus conscience que la mort.
Il pense que s’il était mort ça ne changerait pas grand-chose.
Ni pour lui ni pour les autres.
Il pense qu’il aimerait arrêter de penser.
Et que ça finira bien par arriver.
Little guns
[Sang bleu, Photo Marlene T.]
Samedi 27 octobre 2012
Un petit nouveau
dans la collec' At Home éditions
Aujourd’hui, il n’est plus permis de vieillir !
A partir d’illustrations tirées de la presse féminine et masculine et
d’innombrables publicités vantant la cosmétique du lisse, ce petit
ouvrage raconte la peur de vieillir qu’on nous infuse mine de rien dans
la pensée à grand coups de baguette marketing.
Non, vieillir ce n’est pas grave. C’est ce qui arrive aux vivants.
Aujourd’hui, il n’est plus permis de vieillir
Il faut rester actif
Efficace
Sportif
Compétitif
Jovial
Il faut rester beau–fort–lisse
Sexuellement actif et désirable
Soigner son corps
Garder sa joie niaise d’adolescent
Il faut être performant, séduisant
Ne jamais fatiguer
Savoir s’amuser
Ne surtout pas laisser le temps gagner, tracer ses sillons, nous
amoindrir
La
frontière est de plus en plus mince entre le virtuel et le réel.
Bientôt, on n’aura même plus besoin d’exister pour de vrai.
Les murs ont la parole
[Photo Marlene T.]
Mardi 23 octobre 2012
Pamela
Quand maman me faisait trop mal, j’avais l’impression de ne presque plus
l’aimer. Je n’avais plus envie qu’elle soit ma mère, plus envie d’aimer
personne. Sauf peut-être Pamela, et j'aurais sans doute dû m'en
abstenir.
Un matin de printemps, un nouveau gamin est arrivé dans la classe. Il
était grand et blond et son regard pétillait. Il portait des pulls
rouges ou verts ou bleus. Il était plein de lumière. Tout le monde
semblait ébloui. Il jouait au foot mieux que personne. Dans la cour de
récré, les visages étaient tous tournés vers lui. Les filles rosissaient
lorsqu’il les regardait. J’étais pas vraiment jaloux, mais je
l’observais avec une vague inquiétude. Un matin, il est allé vers l’une
d’elles pour lui demander si elle voulait être son amoureuse. La
fillette a étouffé un petit rire nerveux avant de hocher la tête
vigoureusement. C’était Pamela. J’étais juste à côté.
Je les ai regardés s’éloigner main dans la main. J’ai même pas chialé.
Je mordais l’intérieur de mes joues très fort. Puis je suis allé
rejoindre les autres qui jouaient au foot. Je cognais dur dans le ballon
en imaginant que c’était la tête du nouveau. Ce sale petit vaurien. Je
shootais méchamment et la balle a filé droit vers une fenêtre. La vitre
a explosé. Le maître m’a attrapé par l’oreille, il criait. J’ai été
puni.
Pamela est venue me consoler mais je l’ai ignorée. «Pourquoi tu ne me
parles plus ?» elle a demandé. Je lui ai fait une réponse en forme de
question «Pourquoi tu ne veux plus que je sois ton amoureux ?». Elle a
eu l’air surpris. «Mais... toi et moi on est amis.» elle a murmuré.
L’envie de chialer est revenue. Je me suis remis à mordre l’intérieur de
mes joues. Ça saignait un petit peu. Mes mots étaient coincés avec la
chair entre mes dents. Je me suis barré en courant et j’ai entendu
Pamela crier «T’es mon meilleur ami Franck !». J’aurais certainement dû
m’en réjouir mais ça m’a juste fait encore un peu plus mal.
["Les voix", roman en cours de tricotage]
Neighborhood
[Photo Marlene T.]
Lundi 22 octobre 2012
Les
moutons et les monstres
Mary dit, quand
j'étais petite, les monstres n'étaient pas sous mon lit. Non. En dessous
il n'y avait que des moutons de poussière inoffensifs. Des petites
boules de crasse duveteuses que je serrais dans le creux de la main. Pas
pour les tuer mais juste pour sentir comme je pouvais être forte parfois
si je voulais bien m'en donner la peine.
Je savais être plus forte que la poussière mais pour le reste... Les
monstres n'étaient pas planqués sous mon lit. Non. Ils s'invitaient à
l'intérieur, dans le chaud des draps, dans les replis de mon corps. Ils
étaient plusieurs. Un au bout de chaque doigt de papa et je songeais
parfois à leur trancher la tête mais d'autres auraient sans doute
repoussé. Il y a des monstres plus difficiles à tuer que d'autres. Papa
était comme l'hydre et moi,
je n'effrayais que les moutons. ["Les voix", roman en cours de tricotage]
Easy
like a monday morning
[soleil froid, Photo Marlene T.]
Nanook Webzine
Mailles à l'envers continue de se tracer un petit chemin
mine de rien et ça fait chaud en dedans ! Merci à Laetitia pour
sa
chronique sur le chouette webzine Nanook.
Samedi 20 octobre 2012
L'angoisse
Aujourd'hui, sortie
du n°3 de L'Angoisse dans sa version papier et, pour l'occasion
Christophe Siébert sera à la ZAL avec une belle pile de
revues prêtes à se faire adopter ! Abonnez-vous, qu'ils disaient (c'est
bon pour la santé mentale des auteurs et artistes participants, tant
qu'ils sont en vie!)
Je serai également
présente à la ZAL, salle Pétrarque à Montpellier, à roder du côté
du stand librairie pour vous glisser quelques Mailles à l'envers,
histoire de se préparer pour les longues soirées à venir...
Arachnophilie (20)
[Photo Marlene T.]
Vendredi 19 octobre 2012
Je
suis sale
Parfois je suis sale parce que j’oublie
j’oublie les gens autour de moi
la bienséance
la politesse
les gestes simples
j’oublie comment on tourne un robinet
j’oublie que je n’ai plus d’eau chaude
j’oublie de payer la facture d’électricité
je n’ai plus d’énergie
plus de jus
Parfois je suis sale parce que j’oublie
j’oublie mon odeur
je l’apprivoise
elle me tient compagnie
je passe les doigts dans mes cheveux rêches
comme de la paille
je suis sur la paille
je pue
Parfois je suis sale parce que j’oublie
j’oublie que je suis quelqu’un
j’oublie comment on fait
pour être quelqu’un
Histoire sans paroles (suite)
[Photo Marlene T.]
Jeudi 18 octobre 2012
Le
Freak c'est chick
Ce mois-ci, sortie
du n°3 de
Freak Wave, revue subversive et misanthrope, aux Éditions Bruit
Blanc. « Radicalement subversive, dérangeante, voire noire, la revue
Freak wave est un mélange de styles, de générations et d’origines
unifiés dans un même thème : un insolent parti-pris misanthropique.
Donner libre cours aux humeurs, fussent-elles fielleuses ou cyniques,
aux antipathies pathologiques ou plus simplement à la sincérité.
Freak wave, c’est l’art descendu de son piédestal, ébouriffé de
contre-culture et d’imagerie populaire. Peintures de fêtes foraines,
photomontages troubles, dessins porno-sociaux, pamphlets rageurs, prose
décadente et poésie kamikaze participent de la subversion, à
contre-courant de l’art officiel engendré par les écoles des Beaux-Arts
du Commerce et de la Banalité Equitable. »
Au sommaire de ce
numéro : Féebrile, Patrick Jannin, Chloé Mathiez, Jérôme-David Suzat-Plessy,
Xiaoqing Ding, Joko, Christophe Ripa, Fredox, Ludovic Levasseur, Thierry
Théolier, Nick Zedd, Marlène Tissot, Paul Torres, Ninilazee, Stephen
Somers, Jean-Louis Costes, Pierre-François Moreau, Anne van der Linden,
Jérôme Bertin, Olivier Allemane, Bruno Richard, Gregory Jacobsen,
Angelo, Christophe Siébert, Andy Verol, Lisa B. Falour, Domale, Dom
Garcia, Bruno Baloup, Kiki Picasso, Muzo, Vincent Ravalec, Alex Rossi,
Renaud Brébant, Pascal Doury, Hou Junming, A-geng, Yang Yijiang, Su
Xinping, Feng Zhengjie, Li Wei
Je lui montre la cicatrice encore très visible sur mon orteil. J’avais
onze ans. J’étais allée, en cachette, hacher du bois parce que l’outil
me plaisait. Son tranchant, son poids. Son allure d’arme. Je l’ai lâchée
sur une bûche, un peu maladroitement. La lame a écroulé le rondin, a
tranché le cuir de ma chaussure et un bout de ma peau et un bout de ma
chair.
Il regarde mon pied comme si c’était mes seins ou mon sexe. Il pose son
index délicatement sur la cicatrice nacrée et il dit : je
t’aime. Moi, je me demande si ce ne sont pas plutôt toutes les histoires
que je lui raconte qu’il aime. Alors je garde mes vêtements bien
boutonnés, bien verrouillés. Et puis je me mets à parler du temps qu’il
fait. On ne sait jamais...
Mercredi 17 octobre 2012
Nous
Ce
n'est pas toujours facile
d'extirper le je
du nous
quand il dure depuis si longtemps
quand il est devenu si confortable
ce nous
comme un petit intérieur meublé
trop meublé, peut-être...
Let
me out
[Bruxelles 2012, photo Marlene T.]
Mardi 16 octobre 2012
Going backward
Autrefois, lorsque
j’étais enfant, j’aimais regarder le soleil en face puis fermer les yeux
pour voir des formes blanches et mouvantes se dessiner sous mes
paupières. J’aimais aussi beaucoup marcher pieds nus et sentir la
matière me raconter des histoires, le parquet, le lino, la vase, le
sable, le gravier qui blesse un peu, les brins d’herbe qui se coincent
entre les orteils. Aujourd’hui, je n’y pense plus trop et je me demande
ce qui a fait changer tout ça, pourquoi en grandissant on perd cet
émerveillement pour les choses minuscules ?
Sans doute, comme tout le monde, je sais confusément pourquoi et c’est
plus simple de ne pas se poser la question. Un adulte ne doit plus
perdre son temps avec les choses inutiles. Ne doit pas s’amuser
bêtement, doit éviter de rêver par crainte du réveil douloureux. Un
adulte doit réfléchir, penser en termes d’avenir professionnel, en
termes de confort matériel, en termes de consommation, de concurrence,
d’efficacité, de sacrifices, en termes de famille à fonder, d’enfant à
éduquer, de vacances à planifier. Un adulte doit être raisonnable,
responsable, doit adapter sa ligne de conduite à la raideur de la
société, se fondre dans la masse. Grandir, c’est devenir docile, courber
l’échine, se plier aux exigences, rentrer dans le rang, éviter la
sanction, éviter l’exclusion, ne pas se faire remarquer, ne pas rire
trop fort, ne pas pleurer non plus ou alors seulement sans raison.
Est-ce qu’on nous apprend toutes ces choses ? Est-ce qu’on y glisse
insidieusement par mimétisme, qu’on y succombe par fatigue ? Est-ce
qu’on se laisse décolorer l’âme un peu trop facilement ?
Autrefois, lorsque j’étais enfant, j’aimais poser un cube de sucre sur
ma langue et le presser contre mon palais et sentir ses arêtes pointues
s’arrondir doucement, s’adoucir, se liquéfier. Aujourd’hui, je refais ce
geste. Je remonte le temps. Je redeviens souple, élastique,
indisciplinée. Je redeviens enfant dans mon corps d’adulte, je vandalise
le terrain de jeux, cet espace devenu vaste et vacant à l’intérieur de
ma peau. Je régresse. Je recule. J’ai enfin l’impression d’avancer.
Comme les blés
[Photo Marlene T.]
Lundi 15 octobre 2012
Le froid qui
colle les chaussettes
Il fait froid, c’est dimanche, tout le monde dort, même les chiens de la
baraque à côté, même les oiseaux, même le ciel. Dans la vieille
cheminée, le feu a disparu sous une couverture de cendres. J’ai froid,
j’ai froid et je n’arrive plus à penser à quoi que ce soit d’autre.
Quand t’as froid, parfois tu as des idées saugrenues. Comme par exemple,
essayer d’avoir encore plus froid pour ensuite avoir moins froid. C’est
ce que je me suis dit et j’étais pas bien vieille et j’étais pas bien
maline. J’ai décidé d’aller faire un tour dehors avec mon gilet
par-dessus le pyjama avec mes yeux crottés avec ma double paire de
chaussettes qui collait au givre sur la grosse marche en pierre devant
l’entrée.
L’hiver avait cristallisé le paysage dans son blanc granuleux. J’ai
marché un peu et je me suis mis à avoir plus froid que froid et des
glaçons mordaient la plante de mes pieds, ils remontaient avec leurs
dents le long de mes jambes, mon dos, ma tête. Je suis allée jusqu’au
petit ruisseau derrière, celui qui coulait sous le cabanon où on faisait
caca. Il y avait une croûte de glace à la surface de l’eau et je me suis
demandé si le poids de nos crottes pourrait la briser.
J’avais les pieds collés au froid du sol et à chaque pas mes chaussettes
faisaient un bruit, croutch croutch,
en se détachant du givre.
J’avais plus froid que froid, mais je ne tremblais même plus. Mes joues
brûlaient, j’avais les doigts rouges et durs. Je me suis dit que ça
allait bien comme ça. Je suis rentrée. Et, à travers les chaussettes
humides, j’ai trouvé le carrelage de la cuisine presque chaud et l’air
qui rentrait dans ma bouche était presque chaud, j’ai mis ma main sur
les cendres et elles étaient presque chaudes. J’ai eu envie de retirer
mon gilet, mais je l’ai gardé encore un peu pour avoir presque chaud.
J’étais fière de mon idée d’avoir plus froid que froid pour ensuite
avoir presque chaud. Je me suis demandé pourquoi personne n’y avait
pensé avant moi.
Le lendemain je me suis réveillée avec un rhume carabiné et ma voix qui
s’était fait la malle. Je me suis demandé si c’était lié au froid dehors
qui colle les chaussettes. J’ai décidé que non. Je voulais que ma bonne
idée reste une bonne idée.
Encore une chouette petite chronique à propos de Mailles à
l'envers dans le mag'
Arkult !
Vendredi 12 octobre 2012
Existe !
Tu
existes et
tu n'existes pas
tu existes parce qu'il y a des images
et le son de ta voix
mais tu n'existes pas parce que tu n'es pas là
je ne peux pas te toucher
tu n'es qu'un objet rêvé, fantasmé
alors je peux bien continuer de t'inventer
te dessiner comme je te veux
très fort
en traits délicats
Pour
voir bien
il ne faut pas caresser du regard
il faut empoigner chaque détail
il faut mordre avec les yeux
A
dimanche !
Mardi 9 octobre 2012
Le père
« Parle-moi de ton père. » dit Mary. Et Franck lâche un petit rire sec.
« Je n’ai pas de père. Je n’ai jamais su qui il était.
— Et tu n’as jamais demandé à ta mère ?
— Oh si ! Mais elle, son truc c’était les questions, pas les réponses...
Alors je faisais avec. Parfois, ça me rendait dingue quand j’écoutais
les autres gosses débiter leurs histoires de parties de pêche avec le
pater. Ou bien, comment ils construisaient des cabanes, réparaient les
vélos, allaient au ciné voir des films de super héros. Moi, j’avais rien
à raconter. Et j’ai jamais été très doué pour inventer. Alors je fermais
juste ma gueule.
Parce qu’avec maman, on ne faisait pas grand-chose. Un pique-nique au
bord du lac de temps en temps avec pépé et mémé, tonton et tata. Puis
les vieux sont morts, tata s’est barrée, tonton a déménagé et on a fini
par ne plus rien faire du tout, maman et moi.
Ça ne me manquait pas vraiment. Je jouais dehors et puis, le soir, elle
m’appelait par la fenêtre et je devais remonter fissa. Fallait aller à
la douche, faire les devoirs puis c’était l’heure du dîner et maman
posait ses coudes sur la table, posais des tas de questions. Ça
commençait toujours par des petites questions anodines, mais je savais
que les choses pouvaient dégénérer en une fraction de seconde.
Tant que je répondais convenablement, si je ne faisais pas de secret,
alors elle restait calme et après le dessert je pouvais aller bouquiner
tranquillement pendant qu’elle regardait les informations. Mais si je ne
disais pas absolument, exactement, ce qu’elle souhaitait entendre, maman
se raidissait imperceptiblement. Elle serrait les mâchoires très fort,
son visage de plus en plus blanc, ses yeux de plus en plus noirs. Elle
ne hurlait pas tout de suite. Elle essayait de maintenir le calme dans
sa voix. Et elle demandait " Et la petite Pamela ? Tu crois que je ne
vous ai pas vu tous les deux aller vous planquer dans les buissons ?".
Maman n’aimait pas que j’aime Pamela, que je dessine ses tresses, que je
la regarde comme ça, que je lui tienne la main. Alors c’est vrai,
parfois on allait se cacher tous les deux, on s’asseyait face à face et
on se racontait des histoires pour rire ou pour se faire peur. Mais
maman s’imaginait qu’on s’embrassait, qu’on faisait des tas de choses
auxquelles on n’aurait même pas eu l’idée de penser. " Me prends pas
pour une imbécile, je sais que vous faites des saletés !" elle disait.
Et mes jambes se mettaient à trembler, maman allait hurler bientôt si je
persistais à lui sire la vérité, ma vérité et pas les choses
qu’elle imaginait.
Maman posait des questions, mais elle n’était pas du genre à accepter
qu’on lui en pose à elle. Alors, quand je lui demandais à propos de mon
père, elle levait les yeux au ciel en soupirant. Elle faisait du
silence. Et si j’insistais, elle se foutait en rogne. "Arrête un peu de
m’agacer avec toutes ces histoires. T’as pas de père et puis c’est tout
!" elle criait. Moi, j’attendais juste qu’elle me dise un truc comme, je
sais pas, son prénom par exemple. Un détail. Rien de plus. "Un père j’en
ai forcément un, j’insistais, têtu. T’as pas pu me faire toute seule.
Pour avoir un bébé il faut une graine, je suis au courant de comment ça
marche !". Elle m’a giflé ce jour-là. Très fort. Puis m’a traité de sale
petit pervers en prétendant que la graine à me faire pousser avait été
semée par le vent et devait venir d’une foutue mauvaise herbe. Elle m’a
dit qu’il était hors de question de revenir sur le sujet.
Plus tard, en grandissant, il m’est arrivé de penser que maman avait pu
se faire violer. Et que si j’étais le fruit de ce crime, alors, ça
expliquait sans doute qu’elle ait parfois l’air de me haïr tellement
fort. »
["Les voix", roman en cours de tricotage]
I'm not there
[Photo Marlene T.]
Lundi 8 octobre 2012
Surtout pas
Je te dessine – en caresses immobiles – sur le blanc des nuits
sans sommeil – je regarde le plafond opaque comme un ciel dans
lequel ne brillerait aucune étoile – je ne touche rien ni
personne – même pas moi – surtout pas moi
Esprit es-tu las ?
[Avignon, Photo Marlene T.]
Samedi 6 octobre 2012
Histoires noires
Franck a parfois ce regard lointain et accroché à l’invisible. Comme
s’il contemplait des secrets. Ça lui arrive lorsque je sais rester
silencieuse suffisamment longtemps. Lorsqu’il oublie ma présence. Alors,
il plonge quelque part dans le grand bain de ses pensées. Il n’est plus
tout à fait là. Et moi, je ne bouge surtout pas, je tente de déchiffrer
le langage de son visage, la courbe des sourcils, les tempes qui
palpitent, les lèvres qui s’entrouvrent et puis se serrent, les yeux qui
s’assombrissent. Je me dis que le film dans sa tête ne doit pas vraiment
ressembler à une comédie. Et je voudrais bien m’y glisser, prendre la
peau d’un personnage secondaire qui ferait rebondir l’action. Peut-être
même y dessiner l’esquisse d’une happy-end. J’aimerais avoir ce talent
là mais, sans doute ne suis-je douée que pour ajouter un peu plus de
pénombre aux histoires noires.
["Les voix", roman en cours de tricotage]
Histoire sans
parole
[Photo Marlene T.]
Vendredi 5 octobre 2012
Les
ombres et les lumières
Quand tu me parles,
quand tes mots se posent doucement sur mes paupières, quand tes mains
bougent lentement dans l'air pour accompagner ta voix, la paix se fait
enfin, les frontières disparaissent. Je me retrouve soudain entière
et réconciliée. Les ombres et les lumières ne se disputent plus l'espace
à l'intérieur de moi.
C'était écrit sur l'asphalte
[Bruges, Photo Marlene T.]
Jeudi 4 octobre 2012
Les
rêves en face
Regarder ses rêves en face
droit dans les yeux
parfois ça ressemble un peu
à une manière de leur dire
adieu
Leave and let die
[Photo Marlene T.]
Mercredi 3 octobre 2012
Les anges
Les anges ne sont pas de petits êtres blonds et joufflus. Ils sont
grands et maigres, ils ont les yeux et la voix sombres. Ils veillent sur
les morts dans un cimetière. Ils veillent sur les âmes dont plus
personne ne se soucie. Ils sont là pour les vivants qui ne croient
plus en rien. Ils ne parlent pas beaucoup. Ils posent juste leur regard
et leurs longues mains bien à plat sur les blessures invisibles. Ils
exhalent de l’espoir sans même le savoir. Franck est un ange, mais je
crois qu'il l'ignore encore.
["Les voix", roman en cours de tricotage]
Angeles
Fuck, fuck, fuck...
« Alice:
How long is forever? White Rabbit:
Sometimes, just one second. »
Lundi 1er octobre 2012
La
route
Pendant des années,
mon sommeil est resté sombre et lourd. Des kilomètres de nuits noires,
rugueuses, immenses, comme des autoroutes fraichement goudronnées. Un
terrain rigide et vierge de tout. Comme s’il ne restait plus rien à
rêver. Comme si j’avais des tas de nuits à rattraper pour effacer toutes
ces années de cauchemars éveillés dans mon enfance.
["Les voix", roman en cours de tricotage]